citations,poèmes et proses au fil du jour...en français et traduit en espagnol
Vidéo de James Horner, musique :One Last Wish, film:Casper.
J’aimerais partager avec vous un extrait d’un grand poète, Rainer Maria Rilke et cet écrit que j’aime beaucoup car très profond est une belle réflexion qui nous montre un point de vue d’une grande beauté, juste une rosée sur nos âmes…en ces temps particulièrement perturbés…
Parfois j’aime me laisser porter par la sensation des mots….comme chez tant de poètes, ils ont cette magie qui envahit notre âme et la laisse fleurir à l’infini…par chaque mot qui se pose en elle… Petite Marie
Le premier mot d’un vers… (Rainer Maria Rilke.)
«Il faudrait attendre et butiner toute une vie, quand une longue vie a été possible; et après, enfin, plus tard, peut-être qu’ils sauraient écrire les dix lignes qui seraient bonnes. Puisque les vers ne sont pas, comme le croient certains, des sentiments (ils sont là toujours trop tôt), ce sont des expériences.
Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin. Il faut pouvoir repenser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours d’enfance dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait qu’on froissât lorsqu’ils vous apportaient une joie et qu’on ne la comprenait pas (c’était une joie faite pour un autre), à des maladies d’enfance qui commençaient si singulièrement, par tant de profondes et graves transformations, à des jours passés dans des chambres calmes et contenues, à des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de voyage qui frémissaient très haut et volaient avec toutes les étoiles – et il ne suffit même pas de savoir penser à tout cela.
Il faut avoir des souvenirs de beaucoup de nuits d’amour, dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes accouchées qui se refermaient. Il faut encore avoir été auprès de mourants, être resté assis auprès de morts, dans la chambre, avec la fenêtre ouverte et les bruits qui venaient par à-coups.
Et il ne suffit même pas d’avoir des souvenirs. Il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux, et il faut avoir la grande patience d’attendre qu’ils reviennent. Car les souvenirs ne sont pas encore cela. Ce n’est que lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard, geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est qu’alors qu’il peut arriver qu’en une heure très rare, du milieu d’eux, se lève le premier mot d’un vers. »
R.M.Rilke.
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Video de James Horner, música :One Last Wish, película: Casper.
Me gustaría compartir con ustedes una parte de un escrito de un gran poeta, Rainer María Rilke y este escrito que me gusta mucho porque muy profundo, es una bella reflexión que nos muestra un punto de vista de una gran belleza, justo un rocío sobre nuestras almas en estos tiempos particularmente perturbados…
A veces me gusta dejarme llevar por la sensación de las palabras .como tantos poetas, tienen esa magia que invade nuestra alma y la deja florecer al infinito para cada palabra que se posa en ella…
Marisol
La primera palabra de un verso… (Rainer María Rilke.)
“Se debería esperar y libar toda una vida, si es posible una larga vida; y después, por fin, más tarde, quizá se sabrían escribir las diez líneas que serían buenas. Pues los versos no son, como creen algunos, sentimientos (se tienen siempre demasiado pronto), son experiencias.
Para escribir un solo verso, es necesario haber visto muchas ciudades, hombres y cosas; hace falta conocer a los animales, hay que sentir cómo vuelan los pájaros y saber qué movimiento hacen las pequeñas flores al abrirse por la mañana.
Es necesario poder pensar en caminos de regiones desconocidas, en encuentros inesperados, en despedidas que hacía tiempo se veían llegar; en días de infancia cuyo misterio no está aclarado aún; en los padres a los que se mortificaba cuando traían una alegría que no se comprendía (era una alegría hecha para otro), en enfermedades de infancia que comienzan tan singularmente, con tan profundas y graves transformaciones; en días pasados en habitaciones tranquilas y recogidas, en mañanas al borde del mar, en la mar misma, en mares, en noches de viaje que volaban muy alto y temblaban con todas las estrellas…y no es suficiente incluso saber pensar en todo esto.
Es necesario tener recuerdos de muchas noches de amor, en las que ninguna se parece a la otra; de gritos de parturientas, y de leves, blancas, durmiente recién paridas, que se cerraban. Es necesario aún haber estado al lado de los moribundos, haber permanecido sentado junto a los muertos, en la habitación, con la ventana abierta y los ruidos que llegaban a golpes.
Y tampoco basta tener recuerdos. Es necesario saber olvidarlos cuando son muchos, y hay que tener la gran paciencia de esperar que vuelvan. Pues los recuerdos no son aún esto. Hasta que no se convierten en nosotros, sangre, mirada, gesto, cuando ya no tienen nombre y no se los distingue más de nosotros, solo entonces nos puede suceder que en una hora muy rara, del centro de ellos, se eleve la primera palabra de un verso. “
R.M.Rilke.